Chaises et tuyaux
[disponible à la librairie du Centre Canadien d’architecture et du centre Clark]
ISBN 978-2-9822406-0-5
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2024
96 pages
Siège à dossier pour une personne, conduit à section tubulaire.
Beaux, universels, indispensables objets.
Poème-argumentaire
Chaises
Le transat de mon jardin, le banc de la taverne et la Chaire de Saint-Pierre sont toutes sœurs.
Assis est le ministre, assis est le mendiant.
La chaise rayonne lorsqu’elle est vacante.
Elle révèle alors pleinement son corps ; de ses bras, de son dos, de ses jambes.
De tout son être, elle reflète la forme humaine.
Libre, impartiale, disponible, son siège est un sanctuaire.
Tuyaux
Souple, rigide, tordu, droit.
Le tuyau brille par sa simplicité et l’honnêteté pure de sa forme.
Il est par-delà coule, arrive et s’échappe.
Le tuyau enveloppe le monde de ses grands bras rassurants.
Il apporte et dispense la vie.
Il est racine de la civilisation.
Chaises et tuyaux est une œuvre dédiée à ces machines diverses, omniprésentes et universelles.
Sans mise en scène, cette collection est le fruit de deux années de rencontres hasardeuses au Québec, à Vancouver, en Italie et dans les Balkans.
À ces objets pour nous acquis, brillants dans l’ombre.
Triomphants sur le vierge, ils sont nos plus fidèles alliés.
Wrapped
Photographies argentiques captées sur pellicule orthochromatique, prises à partir de mars 2020.
Description de projet
La Covid-19 a radicalement changé notre rapport avec l’environnement et les individus qui nous entourent. L’espace public, lieu d’échange et de partage, est devenu un endroit à aborder avec la plus grande prudence. Certains même ne s’y risquent plus du tout.
Fondamentalement, nos maisons sont des endroits privés, confortables, protégés des éléments externes potentiellement dangereux. Les récentes épidémies ont renforci ce concept. Devant le danger que représente le contact avec l’extérieur, chacun se renferme sur son espace privé. En ses murs, comme dans une bulle, on se protège des dangers qui courent.
Depuis deux ans, hivernité sonne avec confinement, heure normale sonne avec couvre-feu. L’arrivée du temps froid rend le territoire plus hostile et le virus plus menaçant.
Qui, en 2022, se risque au grand jour en plein hiver ?
Le projet Wrapped aborde ce concept à travers la photo. Il cherche à initier une réflexion sur l’évolution de l’espace privé et ses nouveaux enjeux.
Les photographies, captées à partir de mars 2020, montrent des bâtiments physiquement emballés dans une toile. Ces toiles sont installées pour la construction ou la rénovation de bâtiments. Celles-ci prennent souvent des dimensions démesurées, grandioses, absurdes. L’image présente un rapport de volumes et de matérialité entre la toile, souple, qui enveloppe le bâtiment, solide et droit.
Comme les photos sont prises sur pellicule orthochromatiques leur contraste est très bien rendu et les différentes textures transparaissent dans l’image.
La similarité entre la situation de ces bâtiments emballés et l’évolution des mœurs suite au virus Covid-19, particulièrement durant l’hiver, représente l’assise conceptuelle de Wrapped.
Ensuite, le résultat pose une réflexion sur l’évolution de la relation de l’espace public et privé. Comme on construit une barricade, une maison ou un château, la toile prend l’aspect d’une couche protectrice supplémentaire entre l’espace public et privé. On veut s’en isoler, y faire dos, couper le contact avec la réalité, oublier le mercure qui descend.
Sur cette pensée, les images font rêver d’un monde où on se cloisonne, avec des matériaux de fortune, dans sa propre petite bulle aseptisée. Individuellement, chacun vit enveloppé dans sa toile. Comme dans l’ombre et la chaleur d’une couverture, on pourrait en venir à s’y inventer un nouveau monde et à y oublier l’extérieur.
C’est déjà prévu, tout le monde se réveille au printemps.
Feu roulant
Papier photosensible exposé, développé et numérisé. Réalisé en performance vidéo.
[Article paru dans le magazine PICA, numéro 13p0 : l’effet]
L’existence est performance et l’acte induit la conséquence. Lorsqu’il y a lancer, il y a réception.
Très rarement, tous sont consentants et coordonnés.
Feu roulant explore l’interface entre l’intention, l’acte et la réception.
Le protagoniste décroche, par la force de son intention, une lumière en pleine noirceur. La maigre étincelle vient bouleverser l’écosystème de la pièce où l’action prend place. Les éléments à proximité répondent tous de manière différente au changement : variation sur le capteur de la caméra, réflexion sur les surfaces adjacentes, dégagement de chaleur, etc. Les dégâts sont limités.
Toutefois, le papier photosensible, lui, est marqué à jamais. L’exposition a été fatale. Un trempage dans ledéveloppeur révèle l’ampleur des dégâts.Le résultat est unique. L’aspect final est imprévisible.
C’est un miroir déformant, une image parallèle, hors focus. Elle illustre cette variation entre l’intention du protagoniste, l’acte, puis l’effet produit sur la victime.
Une personne a poussé un soupir, une autre a été frappée par la foudre.
Le temps passe. On allume des mèches impunément sans savoir ce qu’il y a au bout.
Restera-t-il un seul papier photosensible non exposé ?
Méga vrac !
Sélection de photos argentiques numérisées